PATRICK BLOCHE – DÉPUTÉ DE PARIS

Quelles sont, sur le Net, les données personnelles qui circulent aujourd’hui sur chacun d’entre nous ? Qui en a la maîtrise et peut les exploiter ? À quelles fins ? Existe-t-il un droit à l’oubli qui permettrait de faire disparaître les informations nous concernant et qui figurent sur Google ou Facebook ? Peut-on échapper au pistage électronique, à la géolocalisation,  aux puces RFID qui, minuscules et invisibles, pourraient dévoiler les moindres recoins de notre vie quotidienne ? La publicité comportementale est-elle une menace ? Et finalement peut-on faire le choix de ne pas exister numériquement ?

Toutes ces questions ont été à l’origine de la mission d’information sur les droits de l’individu dans la révolution numérique dont j’ai été le co-rapporteur.

Il reste que l’univers numérique n’est pas seulement riche de questions plus ou moins inquiétantes ; il est également un nouveau continent qui s’offre à chacun d’entre nous avec des potentialités insoupçonnées. L’accès à la culture, la rencontre avec l’autre, la capacité à s’exprimer plus directement dans un cadre démocratique renouvelé, la faculté de mieux communiquer avec les administrations pour mieux se faire comprendre et respecter par l’État, telles sont aussi les opportunités qui s’ouvrent devant chaque citoyen pour peu qu’il sache comment maîtriser correctement ces nouvelles techniques, s’orienter dans ce dédale virtuel et agir en connaissance de cause.

On le voit, l’enjeu est de taille et le Parlement a une double vocation à intervenir. Comme institution démocratique, il lui appartient de tracer des perspectives communes à tous les citoyens. Comme législateur, le Parlement a évidemment vocation à protéger, par la loi, les droits fondamentaux, à les concilier lorsqu’ils entrent en contradiction, à les encadrer quand l’usage qu’en font certains menace la liberté d’autres citoyens.

La révolution numérique est un formidable instrument de promotion des droits auxquels il faut assurer une protection dans ce nouvel univers. Pour cela, il me semble nécessaire de poursuivre la réflexion autour de 4 axes :

–      en quoi Internet est au service des droits de l’individu. Il constitue un vecteur sans précédent de la liberté d’expression et de communication mais aussi d’accès à l’information, à la connaissance et à la culture. À partir de là, de nouveaux droits ou de nouvelles modalités d’exercice de ces droits émergent comme la e-démocratie ou l’accès aux services administratifs par voie numérique.

–      le droit à une protection de l’individu dans l’univers numérique. Respect de la vie privée,  possibilité, ou non, d’un droit à l’oubli et plus largement, protection des données personnelles que ce soit face au « cloud computing » ou « informatique dans les nuages », aux failles de sécurité, au ciblage publicitaire…

–      le droit à l’accès à Internet. À travers la question de la neutralité du Net et de la fracture numérique, il s’agit de préserver la possibilité pour chacun, qu’il consulte Internet ou s’y exprime, d’accéder à cet instrument aujourd’hui essentiel à l’exercice de ses libertés.

–      la gouvernance et la régulation de l’univers numérique. On constate que les leviers classiques que sont l’action de l’État, en particulier par la loi, demeurent essentiels mais qu’il convient également d’utiliser d’autres instruments plus souples qui engagent les grands acteurs du monde numérique sous l’œil des citoyens. À l’évidence, pour peser face aux grands groupes mondiaux, les États européens doivent fédérer leurs points de vue, l’Union européenne ayant un rôle éminent à jouer en la matière.